L'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) a mené une étude approfondie sur les pratiques managériales en France. Un long rapport d’une centaine de pages, sans compter les annexes, a été diffusé en mars 2025. Il donne une évaluation de l’impact de ces pratiques et les compare à celles des entreprises en Allemagne, Irlande, Italie et Suède. Il émet des recommandations pour améliorer le management en France. Il s'inspire des pratiques observées ailleurs et fait un focus sur le cadre juridique et réglementaire.
Nous avons extrait les principales analyses et recommandations de ce rapport, que nous vous livrons dans l’article ci-dessous. Comme ces sujets nous tiennent à cœur, nous avons également complété l’article de notre point de vue.
Nous avons conçu des formations sur les pratiques managériales. Elles s'adressent à des managers juniors ou à des plus expérimentés. Elles privilégient les échanges d'expériences et les mises en pratique. Elles sont utiles qui être plus à l'aise dans la posture de délégation et de responsabilisation des équipes, à l'animation du "jeu collectif". Elles contribuent à positiver et rassurer. Toutes nos formations sont adaptables aux particularités et à la culture de chaque entreprise.
Et pour ceux qui veulent aller plus loin, nous proposons des accompagnements individuels et sur-mesure.
Selon l'IGAS, les critères d'un management de qualité sont les mêmes quel que soit le pays européen étudié. Deux principes sont à la base de bonnes pratiques managériales : la place accordée à la participation des salariés et la reconnaissance du travail accompli. Ils sont complétés par l'autonomie, la clarté des rôles et la décentralisation de la décision.
Les entreprises convergent dans l’adoption de ces pratiques managériales car elles sont confrontées aux mêmes contraintes. La pénurie de main-d'œuvre, la transformation des attentes des salariés, la quête de sens, etc. sont la conséquence de l’évolution structurelle du rapport au travail, qui s’est accélérée et renforcée avec la pandémie de Covid-19.
Malgré ce contexte, les pratiques managériales apparaissent en France encore très verticales, hiérarchiques, avec une reconnaissance du travail beaucoup plus faible. En comparaison avec d'autres pays européens, la position des entreprises françaises est qualifiée de « peu flatteuse » par l’IGAS.
Les salariés français estiment que le soutien de leur manager est moins systématique que ceux des autres pays de l’UE. Ils sont également deux fois plus nombreux qu’en Allemagne, Irlande et Suède à avoir une faible confiance dans le management. Ceci s’explique principalement par l’éloignement hiérarchique. La qualité de la relation entre les salariés et leur supérieur hiérarchique direct est globalement bonne. En revanche, plus il y a d’échelons hiérarchiques entre le salarié et le manager, plus elle se dégrade. Le contexte où l’organisation du management est verticalisé renforce encore plus ce phénomène.
56% des salariés français estiment que leur travail est reconnu à sa juste valeur, contre 72% au Royaume Uni et 75% en Allemagne. Pourtant, les grilles de rémunérations sont globalement aussi avantageuses en France que dans les autres pays comparés. L’explication des différences se trouve dans les pratiques managériales qui intègrent moins le droit à l’erreur et à l’essai, qui encouragent moins la prise d’initiatives individuelles, et qui valorisent moins les retours d’expérience.
La formation des managers en France est elle aussi critiquée par l’IGAS pour son approche trop académique et peu tournée vers la coopération.
L’APEC a conduit une enquête en 2009 et l’a mise à jour en 2019. Il y a 15 ans, les attentes des directions perçues par les managers étaient très largement centrées sur la performance opérationnelle. Priorité était donnée à l’atteinte des objectifs et à la connaissance technique du métier. Dix ans plus tard, ces attentes se sont déplacées vers plus de relations de travail, c’est-à-dire plus de responsabilisation, de prise en compte de la qualité de vie au travail, et de dynamique collaborative.
L’IGAS confirme cette tendance. Elle la complète avec la vision des équipes et des salariés, qui demandent plus de confiance, d’autonomie, de souplesse, de disponibilité et d’écoute.
Pour les managers, il faut désormais cumuler les attentes sur l’atteinte des objectifs de production et de performance opérationnelle avec les attentes sur les dimensions relationnelles. Ils doivent accorder autonomie des équipes et contrôle de leur activité, adopter un comportement alliant souplesse et autorité, et équilibrer aspiration à la performance et souci du bien-être.
L’IGAS confirme que la qualité du management influence directement la performance économique et sociale des entreprises. Elle rappelle que les pratiques managériales ont un impact sur la santé des salariés, la qualité de l'emploi et du travail. Le contexte actuel est connu pour les difficultés de recrutement et le manque de main-d'œuvre. Dès lors, les tensions internes sur le management et les conditions de travail mentales sont vite sanctionnées par un manque d’attractivité de l’entreprise concernée et par une baisse de fidélité et d'engagement des salariés, deux variables significativement corrélées à la performance des entreprises.
L’IGAS approfondit les liens entre management et cadre réglementaire. Dans les pays où les pratiques favorisent la participation des salariés, le cadre réglementaire existe mais il porte plus sur l’organisation de cette participation et moins sur l’orientation voire la définition des conditions de travail.
Il est ainsi intéressant de se pencher sur la comparaison avec l’Allemagne. La participation des salariés y est réglementée à trois niveaux. D’un côté, elle est définie dans la loi de constitution des entreprises (les comités d’entreprise). De l’autre, elle est assurée par les négociations collectives entre partenaires sociaux dans les entreprises et au niveau des branches. Entre les deux, l’Allemagne est connue pour son principe de cogestion.
De quoi s’agit-il ? Régi par la loi de codétermination de 1976, ce principe inscrit la participation des salariés au gouvernement de l’entreprise, au sein du conseil d’administration ou de surveillance. D’où vient-il ? L’objectif commun des partenaires sociaux en Allemagne est d’éviter autant que possible les conflits au sein des entreprises.
En Suède, la codétermination joue également un rôle clé. En Italie, le dialogue social est fort au niveau des branches. En Irlande, la proximité entre managers et salariés compense la faible représentation du personnel. Dans ces pays, les pratiques managériales sont reconnues de bonne qualité. L’implication des salariés par leur entreprise dans les mesures de gestion des risques psychosociaux y est souvent supérieure de 10 points à celle de la France, dont les résultats continuent de baisser là où la moyenne européenne progresse.
En France, c’est la question « de l’œuf et de la poule ». Le dialogue social a un impact plus limité car il se conduit plus souvent dans la confrontation. Cela contribue à affaiblir la qualité des relations de travail. Les entreprises mettent alors en place l’évaluation des risques psychosociaux en réaction aux obligations administratives. Elles perçoivent ces démarches comme des freins et des lourdeurs, et la motivation à le faire pour des raisons de performance apparaît secondaire.
Se pose alors la question de celles qui travaillent le sujet : le font-elles parce qu’elles atteignent leurs objectifs de performance et estiment qu’elles ont les moyens de traiter le sujet ? ou décident elles d’investir dessus dans un but d’amélioration de leur performance et de leurs résultats ? En tout état de cause, l’important est de le faire dans un état d’esprit volontariste et à intérêts réciproques pour les salariés et l’entreprise.
Pour améliorer la situation en France, l'IGAS émet une série de recommandations relatives à la promotion des politiques managériales dans les entreprises, la mise en valeur des pratiques participatives, et l’accompagnement des managers. Elle estime aussi nécessaire de faire évoluer le système de la formation. Elle pointe le secteur public et l’invite à déployer ces pratiques au sein des administrations pour des raisons autant d’efficience interne que d’exemplarité.
Les recommandations visent en priorité le management lui-même, évidemment. Notons toutefois une bonne chose : elles privilégient d’accompagner les managers plutôt que de les pointer du doigt. C’est un point crucial car leurs questionnements font clairement apparaître qu’ils ont besoin de ce soutien. En effet, ils vivent le fait de concilier les attentes sur la performance et les attentes sur la qualité de la relation comme un alourdissement de la charge de travail… avec les risques et le stress associés.
Les efforts doivent donc être tournés vers eux et à leurs bénéfices : si la ligne du management intermédiaire se porte mieux, la relation avec les équipes et les salariés sera bonne et le cap fixé par la direction sera connu et compris.
L’IGAS préconise aussi de revoir le cadre juridique. Elle envisage l’inscription du sujet dans les thèmes du dialogue social obligatoire, et la réévaluation de la représentation des salariés dans les conseils d'administration.
Malgré des dispositifs publics déjà nombreux en France, la réglementation est vue comme un levier privilégié pour construire ce plan d’amélioration de la qualité de vie au travail. Ceci contraste avec les approches plus équilibrées observées en Allemagne, Suède, Italie, Irlande.
Il faudra veiller au risque que les entreprises prennent ces évolutions comme de nouvelles contraintes. Pour cela, le cadre juridique pourrait valoriser l’exemplarité avec un champ d’application large concernant autant le secteur privé que les administrations publiques. Il pourrait être facilitateur plutôt que contrôlant, pour laisser aux acteurs la possibilité de prendre des décisions opérationnalisables à leur niveau, avec une meilleure efficacité dans les actions et un meilleur impact.
Dans un tel contexte, nous préconiserons aux acteurs économiques d’adopter un état d’esprit ouvert afin de saisir cette opportunité et d’en faire un levier de performance.
Le désengagement ne se traduit pas toujours par une démission soudaine. Il commence par des signaux...
Dans son enquête de conjoncture, BPI France explore les raisons pour lesquelles...
Le monde du travail traverse une période de changement profond. « Démission silencieuse », démotivation, détachement…